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mercredi 10 février 2016

quelques nouveaux textes...

Voici quelques textes récents, billets d'humeur, textes poétiques.....

N'hésitez pas à me faire part de vos commentaires


BOUTEILLE À LA MER


D’abord lyriques, pleines de certitudes qu’elles changeront le monde, toutes nos pensées portent un sens si lourd que leurs retombées se feront forcément bien entendre un jour ou l’autre, avec fracas et succès

D’abord ce vacarme qui fait dans l’esprit des ouragans de belles et pures intentions 
D’abord dans nos yeux de cyclone les foudres de la volonté, la vitesse centrifuge des amours et des espoirs… la montée en puissance du désir de conquêtes
Avec ce courage de cyclope, au début, le gigantisme de notre existence est prêt à tout renverser

Votre plus grand plaisir, des années durant, consiste à faire plaisir à votre entourage

Soirs de griserie, voyages en amoureux, manifestant dans les rues, soirs espoirs, matins catins, nuits blanches et mondes refaits

On se languissait d’avance de votre présence aux occasions festives : toujours un mot pour rire, un d’esprit, un bien senti, un insolent et trois quatre volages
Écarquillant les yeux, tendant l’oreille à tous les murs, goûtant à tous les mets, flirtant à tous les vents : rien n’avait plus d’importance ou de beauté que de trouver en l’autre l’envie impérieuse de partager

Cela prit beaucoup de temps et d’énergie
Ces emplois que nous tînmes, ces projet que nous eûmes, cette fougue de folie tant et tant applaudie en société ; à l’époque on parlait moins encore de vos bons mots que de vos excellentes actions, on admirait en vrac courage, ténacité, rapidité, efficacité, tempérance, honnêteté, amabilité, serviabilité, générosité et bien sûr gentillesse ; on louait vos paroles amènes, votre esprit lucide et bienveillant ; voire on désirait votre corps, certains s’y harnachaient des semaines entières et combien ont langui de vos indifférences ?

Ce n’est pas peu dire qui vous brilliez


Puis
sans raison
sans que cela soit mal ou bien
voilà que se formule un beau jour dans la petite tête la certitude plate et naïve mais indécrottable que rien rime à rien

Sûr, nous sommes seuls

On ne peut rien y faire, ça vient se poser là, comme la prédiction d’une voyante qu’un pigeon viendra demain se poser sur la place Saint Marc

on ne comprend pas cette impression de n’en plus pouvoir
de ne plus sentir
de ne pas savoir quoi
de jour en jour s’acquiert l’insoutenable conviction
l’affreux pressentiment
que les doux temps sont révolus

On réussit mal au fond, finalement, en fin de compte
et comment dire
à se contenter du lot de consolation : poser sa petite pierre à l’édifice

Goutte après goutte, soleil après lune, on aura pourtant instillé et savouré le bonheur, l’humour, la bonne action, la joie de vivre ; une insatiable curiosité aura mené de l’Inde à l’Argentine, de village en village sur les sentiers des Andes, des banlieues de Marseille à la pointe Finistère, du Gard aux Antilles, du Nord à la mer rouge, de visage en visage à boire avidement de bienfaisantes paroles

Et puis, si vous vous étiez mis à compter, balancer, dénombrer chaque événement heureux, recenser dans le registre aux cent mille pages les entrées et sorties de chacun des paysages, de chacun des pavés floués, joues embrassées, cinémas fréquentés, odeurs connues, étrangetés rencontrées ou des questions posées, vous sauriez et ne pourriez que dire, aujourd’hui, combien la vie ne fit que vous combler


Un temps
qui
lentement
immanquablement
passait

en venant sécher chacune de ces gouttes…

passait à n’importe quel heure et sans prévenir juste pour vous apporter une simple petite précision : 

toute peine est perdue



Mélancolique

voilà l’étiquette alors
tu te la colles sur le flanc, sur le front, là où tu veux
que le temps et les gens te donnent peu à peu

Tu es un vilain petit flacon à l’horizontale ci-git parmi cent mille étagères pleines à ras bord de bouteilles d’alcool tristes
un échantillon de sale petit mélancolique

D’un côté affublé d’un bouchon de liège, de l’autre d’un cul : de part et d’autre, tu n’entends plus rien au monde extérieur, ne comprends plus, ne pipes que dalle 
rien n’entre : une case silence désespérée 
derrière ses barreaux ludiques, un Jack récidiviste de Monopoly

Tout au plus en ton centre - bouteillette à l’océan, brinqueballée par les flots- sous l’épaisseur du vieux verre vert, on apercevra cette maquette délavée (un tantinet inutile, non ?) de caravelle colombienne, que l’on trouvera jolie, pas si mal… ce cerveau dans son formol

mais qui sait
un jour tu échoueras avec tes mots sur une plage et l’on les boira ?

Sur ce, Marielle s’esclaffa :
 rien rime à rien… mmm… on ne peut plus riche rime…
 Sûr, nous sommes seuls… mmm… très singulier, ce pluriel… 


Sommes-nous tous semblables ? à ressentir, de-ci de-là, un abandon quasi absolu : quelques paroles vaguement vaines voguent hors du silence, cheminent vers l’absence inexorable de réflexion, aucun mur ne renvoie ni le son ni l’image, plus d’écho, aucune auge pour recevoir le miel, l’onctueuse liqueur -qu’on rêve salvatrice- de la belle et grande âme

Bien évidemment qu’ils reviendront tes espoirs…
bien évidemment qu’elles rejailliront tes lueurs
– Marielle veut vous convaincre

et il faut bien reconnaître qu’elle réussit sans peine, la tendre et irrésistible amie de toujours, une fois de plus, à vous faire rire, à vous faire entrevoir le ridicule de votre situation de geignant dedans sa fictive bouteille
-ignoble créature d’un Occident en fin de vie, possédée par ce mauvais goût de luxe de s’en sentir victime-
à vous arracher encore un de ces sourires par trop craquant

Difficile de lui avouer comme de le lui expliquer :
vous avez, vous et votre siècle, depuis quelque temps
cette incurable maladie

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